Le compositeur irlandais Seamus O’Muineachain nous revient avec un huitième album à fleur de peau : Cage of Time. Un projet atypique, entièrement écrit et interprété au piano solo. Exit les atmosphères ambient éthérées de ses précédents opus — ici, c’est le bois qui craque, les touches fatiguées qui murmurent, et le souffle du temps qui s’infiltre entre les silences.
Tout est né à Belmullet, son port d’attache, alors qu’il patientait dans l’antichambre des méandres administratifs. Lassé d’une première version numérique, il repart de zéro : fini les simulations au clavier MIDI. Il ressuscite son vieux piano droit, usé mais sincère, et c’est là que la magie opère. L’instrument devient confident, exorciste, compagnon de route.
Far, qui ouvre le disque, pose immédiatement le décor : c’est une caresse, presque une berceuse suspendue. Les notes tombent avec précision, comme des flocons qui ne savent pas encore s’ils vont fondre ou rester. À peine le temps de s’y lover que Short Piece For Sleeping Lovers prend le relais — pièce délicate, aérienne, on croirait entendre un souffle amoureux dans une chambre à l’aube.
Plus loin, Petrichor joue la carte cinématographique. Ses ruptures de rythme et ses nuances contrastées évoquent un travelling lent suivi d’une envolée lyrique. Rainwashing, lui, flirte avec des pulsations plus marquées, dansantes, sans jamais trahir l’intimisme du projet.
Et puis vient Finally, dernier fragment, dernier soupir. C’est la synthèse, le rappel, la promesse discrète d’un ailleurs. Un résumé en filigrane de ce voyage introspectif, où chaque note est une trace, chaque silence une respiration.
Avec Cage of Time, O’Muineachain ne signe pas seulement un album : il grave dans le bois les contours mouvants de l’attente, du souvenir, et du temps qui nous échappe.
