Aimer malgré tout : Love Is Everything & It Will Not Save You de David Redd

Certains albums ressemblent à des lettres ouvertes, griffonnées dans le tumulte d’une époque. Love Is Everything & It Will Not Save You, le second disque de David Redd, porte ce souffle brut. Enregistré à Los Angeles sous la houlette de Justin Glasco (Paris Paloma, The Lone Bellow), entouré de musiciens passés par Clairo, Vulfpeck ou Katy Perry, l’album s’impose comme une fresque intime et mouvante, sans volonté de rentrer dans une case.

Ce projet est né d’un amour transcontinental. Redd tombe amoureux au début de 2020, puis traverse les années et les frontières entre les États-Unis et le sud de la France. Une histoire rythmée par les restrictions, les visas, la distance, les journaux télévisés et le souffle d’un ailleurs qu’on essaie de construire. Tout cela se ressent dans l’architecture même de l’album : un collage d’analogique et de numérique, d’élans folk, de pulsations soul, de jazz en clair-obscur et d’échos rock.

Chaque morceau agit comme une vignette émotionnelle. (Not All By Itself) ouvre l’album avec mystère, presque sur la pointe des pieds. Time & Time Again tourne comme une ritournelle entêtante, tandis que Ash & Smoke déploie une brume mélancolique, sensible et inquiète. On retient aussi la tendresse désarmée de Slowly Straight To You, un moment suspendu, dénué de poses, loin de toute emphase.

Redd s’inscrit dans la tradition du songwriter narratif. Avec Jitney Bus Blues, il raconte, sans exagération, des scènes du quotidien qui disent plus que mille slogans. Dans What If This Is Good Enough?, il ose une vulnérabilité rare, cette question simple et essentielle qui plane sur tout l’album : et si aimer, dans ce monde en tension, suffisait ?

Ce projet, inclassable et profondément personnel, capte les dissonances d’une époque à travers le prisme d’un cœur qui bat. Ce n’est pas un album qui cherche à rassurer. Il observe, il ressent, il avance. Love Is Everything & It Will Not Save You est une réponse sans solution, mais pleine de présence. Un voyage entre deux rives, deux mondes, et une seule certitude : aimer, même quand rien ne va.

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