Depuis plus de quinze ans, Blackbird Rebellion façonne une identité musicale à l’écart des projecteurs. Leur cinquième EP, Expedient Means, marque un tournant décisif : plus ample dans la production, plus audacieux dans les textures, mais toujours fidèle à cette tension brute qui les anime depuis les clubs allemands.
En s’entourant de Dennis Rux (Yeah! Yeah! Yeah! Studios, Angels of Libra), le groupe a misé sur une esthétique analogique pleine de chaleur : delays à bande, amplis vintage, couches de guitares entremêlées… tout concourt à élargir leur spectre sonore sans trahir l’âme du projet.
Dès « Backfire », les riffs explosent comme des avertissements. La colère s’y fait électrique, frontale, presque viscérale. Puis viennent les nuances : « A Blister On My Pinky Toe », dont le groove addictif et précis ne vous laissera pas de marbre, ou « Let It All Go », traversé par une tension théâtrale où la dystopie se devine en filigrane. Comme nous, vous allez être transportés dès les premières mesures.
Avec « Phobophobia », le groupe s’attaque aux peurs contemporaines — vieillissement, angoisse sociale, incertitude — sur un canevas rock mêlant urgence nerveuse et envolées qui rappelle les grand classique du genre. Le final, « House Of Cards », laisse place à une mélancolie suspendue, presque fragile, portée par une guitare solitaire et un chant désarmant pour clore le projet en toute beauté.
Avec Expedient Means, Blackbird Rebellion signe une œuvre urgente et lucide, qui ne cherche pas à rassurer mais à faire face. Un cri du cœur habillé de guitares.
Photo par Chrissi Velten