Avec Kakorrhaphiophobia, Deaf Locust poursuit une quête sonore qui échappe aux sentiers battus. Le projet, paru début novembre, semble né d’un dialogue entre ombre et lumière, entre la rigueur du rock et la liberté du cinéma. L’artiste décrit sa musique comme du « prog-adjacent alternative rock » — une formule qui traduit bien cette volonté de tordre les codes sans les renier.
Dès l’ouverture, Even In The Dark impose le ton : un rock alternatif traversé de lueurs darkwave, porté par une batterie fiévreuse et des guitares nerveuses. La voix du chanteur, à la fois charismatique et habitée, vient canaliser cette tension. Puis vient Running Away (feat. Shawn Eldridge), morceau plus posé, presque contemplatif. Le titre s’élève lentement, dans une progression fluide, avant que les guitares ne s’embrasent dans une montée irrésistible.
Tainted World pousse l’expérience plus loin. Les textures y sont abrasives, les voix filtrées, le tout baignant dans une atmosphère darkwave et post-metal, presque industrielle. Et lorsque retentit le morceau éponyme, Kakorrhaphiophobia, tout se dissout : les repères se perdent, le son devient abstrait, expérimental, ponctué de silences lourds et de respirations rituelles.
Deaf Locust livre ici une œuvre organique, taillée dans la matière brute des émotions. C’est une traversée introspective où chaque note semble peser ses mots, un EP qui fait de la peur de l’échec un territoire d’exploration artistique. Rarement un disque aura si bien mêlé tension, beauté et vertige.

