Il y a des morceaux qui ne cherchent pas à séduire, mais à dire. « So Many Bodies », la nouvelle chanson de GlaneX, fait partie de ceux-là. Dès les premières secondes, le ton est donné : un beat minimaliste, dépouillé de tout artifice, porté par une rythmique feutrée et une ligne de basse discrète mais tendue. À l’arrière-plan, des scratches surgissent comme des fantômes du passé, marquant les transitions avec une précision chirurgicale. Et au centre, la voix du rappeur, dense, posée, presque résignée.
Glane X, qui évoque la perte d’un ami d’enfance, ne tombe jamais dans la facilité du pathos. Il raconte, simplement. Il confie même que ce morceau est né des mots qu’il n’a jamais pu dire : « This song is about a close childhood friend that I have lost. The lyrical content expressed some of the unspoken things that I never got to say. » Ces non-dits deviennent ici poésie brute. Il déroule ses souvenirs avec pudeur, comme s’il marchait à travers un cimetière intérieur, égrenant les noms, les rires, les silences.
Son flow, d’une justesse remarquable, épouse parfaitement le climat du morceau. Ni trop lent ni trop démonstratif, il impose un rythme organique, presque narratif. Il y a chez Glane X une capacité rare à manier les mots comme des instantanés de vie, à transformer une douleur intime en chronique universelle.
Mais c’est sans doute le refrain qui reste le plus longtemps en tête. Le titre y est martelé : « So Many Bodies ». Comme une prière, comme une boucle sans fin. Il ne cherche pas l’effet de style, mais frappe l’esprit par sa répétition quasi liturgique. Un leitmotiv qui fait écho à tant d’absences.
« So Many Bodies » n’est pas une simple chanson de deuil, c’est un hommage vibrant, un morceau profond, au service de la mémoire et de l’expression. Glane X y confirme une fois de plus son immense talent, non seulement comme rappeur, mais comme conteur d’émotions. Une œuvre à la fois sobre, forte, et nécessaire.