Insomnia, premier projet du saxophoniste et compositeur Shahar Amdor, appartient à cette catégorie rare des projets qui ne vous laissent pas de marbre. Né en Israël et aujourd’hui basé à Los Angeles, Amdor signe ici une œuvre profondément habitée, enregistrée sur trois continents avec un collectif international. Loin d’un simple exercice de style, Insomnia se présente comme une traversée nocturne, où le jazz moderne dialogue avec des textures électroniques et une ambient feutrée.
Dès l’introduction, une atmosphère cinématographique enveloppe l’auditeur. Mais c’est avec « The First Step Is the Hardest » que le voyage s’intensifie. Ce morceau lentement ascendant capte l’émotion brute du premier élan, celui qui survient malgré l’incertitude. L’improvisation s’y mêle à des nappes synthétiques, dessinant les contours d’un paysage intérieur fragile et déterminé. À travers ce titre, Amdor révèle une sensibilité rare, celle de raconter sans mots les hésitations et les élans du cœur.
Parmi les pièces maîtresses de l’album, la version live de « Acceptance » brille par sa sincérité. Chaque respiration du saxophone, chaque interaction entre les musiciens, révèle une alchimie à la fois maîtrisée et organique. Le titre s’écoute comme une confidence partagée, entre tension retenue et libération sonore. Amdor prouve ici que le live peut être un écrin de finesse, où la virtuosité se met au service de l’émotion pure.
« Erez’s Heart », morceau bonus qui clôt Insomnia avec une douceur poignante. Véritable épilogue, ce titre semble battre comme un souvenir précieux, une pensée adressée à un être cher. L’album s’éteint sans vraiment finir, laissant en suspens une dernière note – qui vous donnera envie de plonger dans le catalogue musical de l’artiste. Une première œuvre remarquable, subtile et personnelle, qui installe d’emblée Shahar Amdor parmi les voix à suivre du jazz contemporain.