Avec Instants, The Idiot Kids livrent un album qui respire l’immédiateté, la tension et la sincérité brute. Enregistré en solitaire par Jon-Mikal, qui signe ici l’ensemble des instruments et des arrangements, le disque porte la trace d’un geste intime devenu nécessité. Faute de pouvoir réunir régulièrement le groupe, le frontman transforme naturellement The Idiot Kids en projet solo en studio — sans jamais perdre l’énergie collective qui a fait leur identité scénique.
Ce nouvel opus condense en 29 minutes un flot de punk queer abrasif, où chaque morceau fonctionne comme une photographie prise en plein mouvement. On y sent la fatigue d’une époque saturée, le vertige d’un monde qui va trop vite, mais aussi l’affirmation d’une identité qui refuse de se diluer. La colère n’y est jamais posée comme un concept : elle surgit, frontale, sans détour.
Age of Instants prend le relais en se faisant plus réflexif. Derrière l’énergie garage, le texte interroge la temporalité contemporaine, cette vitesse qui consume tout et ne laisse que des traces fugaces. La chanson fonctionne comme un manifeste de l’éphémère, miroir de notre époque numérique où les émotions et les révoltes se succèdent sans durée.
Avec Pastor’s Kid, le groupe se tourne vers le portrait social. L’enfant de pasteur devient symbole d’une autorité religieuse qui enferme plus qu’elle ne libère. La rage punk se transforme en chronique, en témoignage, et l’instant capté est celui de la contradiction entre pouvoir moral et désir d’émancipation.
King Taker poursuit cette veine critique en s’attaquant à la figure du dominateur, du leader qui prend sans donner. Les riffs plus lourds, presque métalliques, traduisent la pesanteur du pouvoir et l’instant devient confrontation directe : face au roi, face à l’autorité, la musique se fait arme.
The Letter clôt l’album sur une tonalité plus sombre et retenue. Ballade tendue, voix vulnérable, elle surprend par sa fragilité. Après la rage et la vitesse, le disque s’achève sur un instant de doute, une lettre jamais envoyée qui suspend le bruit et révèle l’intimité.
Instants est un album fragmenté, mais jamais dispersé. Chaque chanson se suffit à elle-même tout en nourrissant une même urgence : capturer le présent dans toute son intensité. Un album court, brut, incandescent — et sans doute le plus abouti des Idiot Kids.

