Quatorze ans de silence, et voilà que Stephen Becker — l’âme derrière Le Concorde — revient avec un album qui a tout d’une révélation : Second Mansions. Ce disque, façonné entre Los Angeles et la campagne écossaise, retrouve l’élan sophistiqué des années 80, mais avec un souffle nouveau, nourri de ferveur mystique et de textures pop luxueuses. On y entend l’empreinte du producteur Calum Malcolm, artisan reconnu pour ses travaux avec Prefab Sprout et The Blue Nile, et l’on croise un véritable panthéon de musiciens, de Pino Palladino à Paul Jackson Jr., en passant par Roger Joseph Manning Jr. ou Jamie West-Oram.
Dès l’ouverture, « Corpus Christi » impose sa force. Avec ses riffs incisifs et ses mélodies éclatantes, le morceau accroche instantanément. La voix de Becker, tendue et habitée, évoque parfois un Bowie des années 80, projetant le titre dans une dimension à la fois familière et saisissante. Plus loin, « Morning By Morning » se présente comme un single potentiel : un piano délicatement harpé, une voix magnifiquement posée, des harmonies limpides. C’est du pop rock intemporel, construit avec une précision d’orfèvre.
L’album prend ensuite une allure plus rêveuse avec « Time Ticking Away », morceau suspendu où l’amour se vit hors du temps. On y retrouve la grâce d’un Prefab Sprout, mais avec une chaleur propre à Le Concorde. Puis, « The Sound Alone » retient le souffle : une chanson toute en espace, en retenue, qui respire et s’ouvre sur un chant discret, presque sacré.
Au cœur du disque, « Memorare » brille par sa densité. Avec l’apport du guitariste Paul Jackson Jr., la chanson prend des allures de prière moderne, à la fois complexe et pleine de soul. Plus loin, « Thérèse of Lisieux » explose en lumière, comme un feu d’artifice pop inspiré des enseignements de la « petite sainte ».
Chaque titre semble être une gemme : « We Are the Songs » déploie ses synthés à la Scritti Politti dans une célébration chorale, tandis que « Thirty-Four Trillion Watts » électrise l’album avec son riff de guitare flamboyant et ses synthés incandescents, sans doute le morceau le plus fédérateur du projet. Même quand l’ombre s’invite, avec « The Devil Is a Mad Dog on a Chain », la tension sert une écriture audacieuse et percussive.
En clôture, « Memorare (Montserrat Version) » allège le propos, radieux et solaire, comme un dernier salut.
Avec Second Mansions, Le Concorde signe bien plus qu’un retour : un manifeste où la pop devient prière, où chaque morceau cherche à toucher le ciel.