Avec Outside Belongings, Shadow Antlers façonne un territoire sonore où l’on avance comme dans une ville inconnue, guidé par des lumières vacillantes et des intuitions anciennes. Jakob, que l’on connaît déjà pour son travail au sein du groupe suédois RAMN, poursuit ici une exploration plus intime : un darkwave organique, modelé par des pulsations presque animales et une écriture qui célèbre ceux qui vivent en marge du bruit du monde.
Dès Trails, on comprend que ce disque n’a rien d’un simple exercice de style. Les guitares se superposent comme des strates géologiques, abrasives puis soudain suspendues, tandis que les percussions installent un battement quasi viscéral. Jakob chante comme s’il avançait dans une forêt d’ombres, la voix frôlant l’os, cherchant ce qui se cache derrière les façades visibles.
L’univers de Shadow Antlers possède cette manière singulière d’évoquer des lieux secrets : des ponts invisibles, des refuges que seuls les outsiders savent reconnaître. You Leave Some Sky In Your Hair en est un exemple parfait, mêlant fragilité mélodique et tension sous-jacente. Plus loin, Blanck Metal et Dim Carcosa plongent dans des contrées plus denses, nourries de références mythologiques et d’un imaginaire littéraire qui ajoute une profondeur inattendue à l’ensemble.
Ce qui frappe surtout, c’est la cohérence émotionnelle du disque. On y sent le conflit intérieur dont Jakob parle ouvertement : cette nécessité de rester fidèle à son identité, même lorsque la société propose des chemins plus normés. Il transforme cette tension en paysages sonores, préférant les matières brutes — cordes, percussions, résonances acoustiques — à une électronique trop lisse.
Outside Belongings n’est pas un album que l’on consomme : c’est une traversée nocturne, un manifeste pour ceux qui habitent les interstices. Une œuvre d’art rock qui, dans sa densité comme dans sa sincérité, appelle à regarder le monde autrement.

