Il y a dans Bestial quelque chose de profondément libérateur, presque rituel. Un instru charnelle, une rythmique house qui galope, des voix qui s’entrelacent — et au cœur de cette transe, la signature d’un artiste revenu de loin. Senior Dunce, alias d’un producteur sud-coréen aussi discret que singulier, poursuit ici son chemin de reconquête intérieure.
En invitant la chanteuse californienne Cheshy et son complice Gimpado, il compose un trip sensoriel où la voix devient un cri contenu, une acceptation des instincts trop longtemps réprimés. Il ne s’agit pas d’excuser nos parts d’ombre, mais de les regarder en face, avec tendresse et lucidité. « We’ve been cruel before, » glisse-t-on, comme un aveu collectif.
Derrière la production ciselée – Senior Dunce a plus de vingt ans de métier, du sound design aux clubs underground – se cache une histoire plus intime. Celle d’un enfant trop sage, brimé, devenu un adulte excentrique, fasciné par les grosses caisses et les marges. À contre-courant, il transforme les stigmates en force créative.
Bestial n’est pas simplement une piste dansante. C’est une mue. Une manière de dire : « voici ce que je suis devenu, malgré – ou grâce à – ce que j’ai été. » Une leçon d’acceptation portée par le beat, par le corps, par la vérité nue d’un outsider qui refuse de se taire.