Un souffle parcourt les premières secondes. Quelques notes de piano surgissent, sobres, presque glacées. Avec “Be With Me”, Ani Even compose un espace de retenue où chaque son semble suspendu dans une chambre d’écho intime. Rien ne presse. La voix, discrète, s’approche comme un murmure, s’enroule autour des silences et dessine une forme de désir lent, enfoui.
Ce n’est pas une chanson au sens classique. Plutôt un rituel, ou peut-être une confidence chuchotée dans le noir. En arrière-plan, un grondement sourd, presque orageux, vient troubler l’équilibre. On pense à un tonnerre lointain, filtré, comme si la tension émotionnelle du morceau se matérialisait en bruit. L’effet est organique, à la fois menaçant et apaisant.
La structure du morceau épouse cette étrangeté. Pas de couplet-refrain, pas de montée classique. Tout repose sur une atmosphère, construite par petites touches. On retrouve ici la patte d’Ani Even : un goût pour l’expérimental, le minimalisme sonore, et cette capacité à faire exister des zones d’ombre dans la lumière. Rien n’est démonstratif, tout est suggestion.
“Be With Me” semble écrit pour les instants d’introspection, ces moments où l’on regarde le plafond sans attendre de réponse. Une chanson qui ne demande pas l’attention, mais l’écoute intérieure. Ani Even nous y invite sans forcer, comme on entrouvre une porte sur un monde secret.