Avec “Passive Moodswings”, Charts and Graphs poursuivent leur exploration des états mentaux qui traversent notre époque, entre lucidité et renoncement discret. Extrait de leur nouvel album Paper Cuts, le titre s’impose comme une chronique nerveuse de la léthargie moderne, portée par une production aussi tendue que répétitive. Dès les premières secondes, des boucles de synthés circulaires s’installent, soutenues par une basse motrice et des percussions sèches, dessinant un cadre sonore à la fois pressant et volontairement mécanique.
Le morceau avance sans détour, avec une efficacité presque obsessionnelle. Charts and Graphs jouent sur la répétition comme un langage en soi, transformant l’énergie du dance-punk en un terrain de questionnement intérieur. On pense à des filiations évidentes — l’angularité de Talking Heads, la rigueur de Gang of Four, l’élan dansant de LCD Soundsystem — mais le groupe parvient à digérer ces influences pour proposer une identité cohérente, contemporaine, jamais pastiche.
Sur le plan des paroles, “Passive Moodswings” touche juste. Le texte évoque ce désir diffus de bien faire, de s’impliquer, constamment repoussé par une fatigue morale tenace. Faut-il agir sincèrement ou simplement donner l’illusion de l’engagement ? La question plane tout au long du morceau, sans réponse définitive, renforçant ce sentiment d’entre-deux qui en fait la force.
Avec ce single, Charts and Graphs livrent une chronique sonore du désengagement poli, dansante mais lucide, et signent l’un des moments les plus parlants de Paper Cuts. Un titre qui capte l’air du temps sans jamais forcer le trait.

