Conversation avec : LOLITA TERRORIST SOUNDS

Ces derniers temps nous avons beaucoup relayé la musique de LOLITA TERRORIST SOUNDS. En effet, le groupe dont nous avons découvert le travail il y’a quelques semaines seulement, nous surprend à longueur de publication grâce à une musique de qualité, un esprit créatif, une ambition qui nous laisse présager de belles choses pour l’avenir. Nous avons voulu en savoir encore plus.

1- Parlez-nous de votre groupe. D’où venez-vous et comment vous êtes-vous rencontrés ?

Je suis originaire de Naples, en Italie, mais notre groupe est actuellement basé à Berlin, en Allemagne. Notre groupe fonctionne avec une formation dynamique, qui a vu divers musiciens aller et venir au fil du temps. En préparation de notre prochaine tournée, nous avons ajouté le batteur allemand Fritz Schmak à la programmation. Notre dernier album présente également des musiciens invités qui ont apporté une contribution significative à notre musique, notamment la légende du lap steel Kristof Hahn (connu pour son travail avec Swans et Pere Ubu), ainsi que Bob Rutman et Roderic Miller.

2- Parlez-nous de la première chanson que vous avez composée ensemble. De quoi s’agissait-il et parlez-nous du son ?

« Shaved Girl » a été notre première chanson à être interprétée en live et est également sortie en single pendant le mois de la fierté. Cet hymne électrisant est dédié à la libération LGBTQ+, approfondissant les thèmes de la découverte de soi et du courage nécessaire pour embrasser pleinement son identité. En termes de son, j’avais une vision spécifique pour « Shaved Girl ». Mon objectif était de créer une atmosphère hautement rituelle au sein du morceau, en m’inspirant de l’atmosphère envoûtante et mystérieuse de la scène de la mascarade dans la bande originale de « Eyes Wide Shut ». De plus, je me suis inspiré du travail de l’artiste et compositeur autrichien Hermann Nitsch, connu pour ses performances intenses et rituelles accompagnées d’une musique de drone répétitive, souvent associée à des visuels puissants et symboliques.

3- Qu’avez-vous appris de cette chanson que vous utilisez encore aujourd’hui ?

Ce que j’ai retenu de cette chanson et que j’applique encore à notre musique aujourd’hui, c’est l’impact profond de la répétition. « Shaved Girl » est construit autour d’un seul accord, et cette simplicité nous met au défi de livrer une performance captivante et expressive qui dure tout au long de la chanson, un peu comme une pièce de théâtre qui monte progressivement en intensité. Il sert de passerelle vers la réalisation de moments d’extase et de transcendance dans notre musique, soulignant le potentiel transformateur de la répétition en tant qu’outil puissant dans notre processus créatif.

4- Pouvez-vous définir votre style musical et ce que vous souhaitez transmettre à travers celui-ci ?

Définir notre style musical est un peu difficile en raison de la nature innovante de notre travail. Nous nous retrouvons souvent étiquetés comme avant-gardistes, art-rock, rock expérimental, post-punk et industriel par la presse, qui, dans une certaine mesure, capture avec précision nos diverses influences et sons. Nous sommes à l’aise avec ces descriptions, car elles donnent une idée générale de notre musique. À l’avenir, nous pourrions même inventer notre propre genre pour Lolita Terrorist Sounds, le « rock tribal transcendant » étant un candidat potentiel.


5- Vous avez également un univers visuel très personnel. Pouvez-vous nous le définir et nous donner une grille d’interprétation de cet univers visuel ?

Les éléments visuels font partie intégrante de l’identité de Lolita Terrorist Sounds, servant à décrire de manière vivante les personnages et les récits trouvés dans nos paroles. Il agit comme une extension sensorielle de notre monde sonore. La collaboration a toujours été au cœur de nos efforts visuels. Une collaboration notable a été celle avec le talentueux photographe et artiste italien de genre fluide, Marilebones, qui a contribué aux visuels de « Mind the Gap » et à notre plus récente session vidéo en direct, « St. Lola ». Marilebones a également joué un rôle clé dans notre récente séance photo promotionnelle, nous aidant à créer une présence visuelle distincte et mémorable. Une autre collaboration visuelle importante dans notre histoire a impliqué Reinhard Kleist, un dessinateur allemand de renom. Les illustrations de Reinhard ont orné notre sortie live « Shaved Girl ». Il est largement reconnu pour son travail sur des romans graphiques comme « Mercy on Me » de Nick Cave et « Starman » de David Bowie.

6- Quels sont les artistes qui vous inspirent musicalement et visuellement. Pourquoi ?

Musicalement, j’ai eu l’honneur de jouer avec la légende sénégalaise Doudou N’Diaye Rose, dont le profond impact sur moi a transformé ma vision du rythme. J’admire profondément la liberté artistique interdisciplinaire dont font preuve des collectifs d’avant-garde comme The Residents et l’innovation révolutionnaire de The Velvet Underground. Dans le domaine du cinéma, le travail des westerns de Wim Wenders et de Sergio Leone m’a laissé une impression durable. Leur narration visuelle et leurs techniques cinématographiques ont influencé mon approche créative. Le théâtre allemand a joué un rôle central dans la formation de ma présence sur scène, avec des inspirations allant des idées innovantes de Bertolt Brecht au génie de la mise en scène de Peter Zadek et Heiner Müller. La culture française a également été une source d’inspiration. Les influences musicales englobent des artistes comme Serge Gainsbourg, Alain Bashung, Les Negrette Vertes, Mano Negra et Edith Piaf. Le monde du cinéma français, dirigé par des personnalités comme Jean-Luc Godard, a marqué ma sensibilité visuelle. De plus, les œuvres de poètes français tels que Charles Baudelaire, Stéphane Mallarmé et Arthur Rimbaud ont contribué à ma profondeur lyrique et artistique.

7- On vous a découvert avec la vidéo live de la chanson « St. Lola ». Parlez-nous de cette chanson qui a donné son nom à votre prochain album ?

St. Lola plonge dans des thèmes lyriques profonds qui explorent la conclusion déchirante d’une histoire d’amour. Le récit de la chanson se déroule sous le ciel sombre et couvert d’un pont désolé de Berlin, à savoir la Warshauer Strasse. Elle tisse une histoire d’amour non conventionnelle, marquée par un adieu poignant entre deux individus profondément liés par leur lien. Lorsque j’ai écrit les paroles de cette chanson, mon objectif était de transmettre de manière vivante les émotions entourant une séparation forcée. Ce thème de la séparation forcée puise ses racines dans un contexte historique, notamment la période mouvementée où Berlin était divisée, entraînant la séparation tragique d’innombrables couples. À cette époque, de nombreux citoyens de Berlin-Est se sont retrouvés arrachés de force à leurs proches à l’Ouest, et ce contexte historique constitue un reflet poignant dans le récit de la chanson.

8- Parlez-nous de l’album « St. Lola ». À quoi faut-il s’attendre d’un point de vue sonore ?

L’album « St. Lola » propose un voyage musical singulier et anticonformiste. J’ai assumé les rôles d’enregistrement et de production, et le mixage a été géré de manière experte par Thomas Stern, connu pour son travail avec des artistes estimés comme Nick Cave, Einstürzende Neubauten, Swans et Crime and the City Solution.
Ce qui distingue « St. Lola » des albums typiques, c’est notre approche peu orthodoxe et créative. D’un point de vue sonore, c’est une puissante fusion d’énergie brute et d’expression artistique sans vergogne. Les chansons de cet album ont été enregistrées dans un ancien bâtiment de Berlin-Est, autrefois utilisé par les services secrets soviétiques pour les écoutes téléphoniques à l’époque du Mur. Cette toile de fond historique unique a servi de toile de fond pour nos débuts en studio. Dans notre processus créatif, nous avons intentionnellement adopté une gamme limitée de microphones vintage et d’équipements analogiques. Notre objectif était de capturer et de préserver la rugosité instinctive de la musique, en évitant un son trop poli. Notamment, l’inclusion d’instruments non conventionnels tels que des réservoirs d’essence, des tôles et des perceuses ont contribué au son distinctif de l’album. Ce choix a été motivé par des considérations à la fois artistiques et pratiques, influencées par des contraintes techniques et financières.

9 – Y a-t-il des personnes avec qui vous avez travaillé sur ce projet et que vous souhaiteriez remercier ?

Certes, plusieurs musiciens ont apporté une contribution artistique significative à ce projet, et je tiens à leur exprimer ma gratitude. Kristof Hahn, qui a été l’un des premiers à nous rejoindre en tant qu’invité spécial, a apporté une formidable présence artistique au projet. Roderic Miller jouait non seulement du piano, mais jouait également un rôle central dans la production vocale.
Je dois également mentionner Bob Rutman, malheureusement décédé peu de temps après les enregistrements. Bien qu’il ait alors plus de 80 ans, il a apporté un élément unique au projet et son souvenir reste précieux. Thomas Stern mérite une reconnaissance particulière pour avoir consacré beaucoup de temps et d’efforts au mixage de l’album et pour avoir patiemment répondu à toutes mes demandes de production.
La liste des personnes qui ont contribué à ce projet est longue, c’est pourquoi nous avons décidé d’inclure une feuille de crédit et de remerciement détaillée ainsi que la copie physique de « St. Lola ».

10 – Quelle est votre prochaine actualité ?

Nos projets à venir sont très excitants. Nous avons une soirée de sortie prévue à Berlin le 2 novembre, et elle aura lieu au 8mm Bar. Suite à cela, nous nous préparons pour une tournée européenne pour donner le coup d’envoi. Nous sommes particulièrement impatients de présenter notre musique au public français et avons hâte d’y jouer. Restez à l’écoute pour plus de détails et de mises à jour alors que nous annonçons nos dates de tournée et nos activités promotionnelles.